dimanche 4 avril 2010

Cheminée pour cheminée

Cheminée pour cheminée, viens donc t’asseoir avec moi au salon. Prends cette petite chaise basse où nos grands-mères s’asseyaient pour emmailloter et dorloter leurs bébés.
Rien à voir avec ce que tu peux admirer aujourd’hui, la cheminée autrefois c’était l’âme de la maison.
L’hiver on tendait vers la flamme les membres engourdis – on y faisait la cuisine.
Dans l’âtre très haute noircie par la fumée, pendait la crémaillère où l’on accrochait les pots de fonte. C’était ici que bouillait la soupe, cuisaient le lard et les pommes de terre.
Devant le feu, la braise un peu retirée, le pot en terre où mijotaient de longues heures les « mongettes ». De temps en temps il était obligatoire de les « crêtre », c’est-à-dire ajouter un peu d’eau à chaque fois qu’elle diminuait. Travail de l’ancien qui occupait le coin de la cheminée et ne devait pas faillir à ce devoir sacré. Que manger s’ils étaient « rimés », cuits sans eau ?
- on déjeunait tous les jours ainsi ?
- on faisait aussi des fritures, des fricassées, des crêpes en posant une poêle à longue queue sur un porte poêle fixé à la crémaillère.
De chaque côté, sur les jambages, à l’intérieur pendaient les louches, les écumoires, les grils et les poêlons déjà bien noircis par la fumée.
Le feu lui, était alimenté par deux bûches posées sur deux landiers (chenets) et parfois il n’y avait plus que deux « mouchons » qui se croisaient dans le foyer. Illusion de feu car de plus si la cheminée fumait on devait laisser la porte entr’ouverte pour le tirage. On les poussait au fur et à mesure pour qu’ils se consument lentement.
Suivant les besoins du moment, on actionnait le soufflet tout prêt à fonctionner. Sa place ; il était accroché à un clou sur le côté avec la boîte à sel.

Bien souvent, on profitait de la braise pour faire une rôtie. On enfilait une tartine de pain dans un pique en bois et là, le miracle se produisait : une tartine bien dorée, croustillante dont on rêverait encore.
- C’était un drôle de grille-pain Mamie ?
- Plus tard, une sorte de gril en fil de fer prit la fonction face au feu.


Mais la cheminée c’était aussi le chauffe-eau de la maison.
- Comment ?
- Oui, là on mettait l’eau dans un chaudron, pour pouvoir laver la vaisselle. A cet usage, un « bouchon de vaisselle » se présentait sous la forme d’un manche assez fin en bois au bout duquel on attachait une poignée de chiffon. L’eau de vaisselle était mise de côté pour la soupe des cochons.
- C’était bon pour eux ça ?
- On n’ajoutait pas de produits à cette époque.

L’eau chaude du chaudron servait aussi à faire la toilette devant le feu, alors que l’été l’eau chauffait au soleil !!!
- Que ne pouvait-on pas faire dans la cheminée !
- C’est sûr – à côté, en dessous de la fenêtre en prolongement du foyer, trônait le potager.
- Le potager ?
- Ce n’est pas le jardin, bien sûr. C’était une sorte de table en pierre, plus tard en faïence, percée d’un trou pour recevoir la braise. Là on déposait la cocotte pour finir de cuire ou pour réchauffer la victuaille en sauce. Sur l’extrémité opposée un seau d’eau pour la cuisine.
Dehors, près de l’entrée un seau pour se laver les mains, la cassotte chevauchait ce récipient et distribuait l’eau en un mince filet. Le puits était loin et le précieux liquide demandait beaucoup d’efforts pour arriver jusqu’à la maison.
-Comment faire s’il n’y avait plus d’eau ?
-L’homme aura peut être compris avant d’en arriver là !!

C’est l’heure de passer à table. La « bourgeoise » rallie son personnel autour d’une longue table à tiroir. Au bout dans cette « tirette » on mettait les restes de pain, de fromage. On y rangeait le couteau de cuisine. On s’asseyait sur des tabourets (une planche sur 3 pieds en bois grossièrement taillés ou sur des bancs fabriqués de la même manière)

- Ce n‘était pas très confortable si l’on y restait longtemps assis.
- On s’y habitua sûrement jusqu’à ce que les chaises apparaissent.

Le manteau de la cheminée était décoré d’un crucifix au milieu puis une série de pots en fer pour café, farine, poivre et sucre en ordre décroissant.