dimanche 27 février 2011

1939-1940

La guerre commença en septembre 1939. La mobilisation générale s’effectua, faisant appel à toutes personnes majeures ayant fait leur service militaire.

On vit partir nos pères, nos frères, nos voisins afin de rejoindre leur régiment de formation pour la grande inconnue. Le temps de leur affectation, la distribution des paquetages terminée, les chevaux réquisitionnés arrivèrent pour déambuler rapidement vers l’Est et se poster pour faire front à l’ennemi.

Le régiment du génie se repliait quand d’autres arrivaient se jeter dans la gueule du loup et devenir prisonnier.

Au 16ème jour les Allemands envahissaient la Hollande, le Luxembourg, la Belgique. Déjà un flot de réfugiés se déversait sur notre région. Ils partaient les uns en voiture à cheval emportant quelques affaires, d’autres en vélo avec dans la poussette les enfants qui suivaient le mouvement de cette foule affolée qui ne connaissait pas sa destination. Le seul objectif fuir, fuir l’ennemi qui parfois les avait devancés.

La société de non-consommation s’installa par la force des choses. Les rationnements de tous les produits devinrent obligatoires. Chacun se vit attribuer une première carte d’alimentation. Elle avait la forme d’un carnet à la couverture jaunâtre légèrement cartonnée.

A l’intérieur des coupons numérotés et établis en fonction de l’âge du consommateur :

E  - moins de 3 ans
J 1 – 3 à 6 ans
J 2 – 6 à 12 ans
A  adultes de 12 à 70 ans
M  manuels (en 1945)
V  vieux à partir de 70 ans
T F  Travailleurs de force (supplément)
C  Cultivateur à 70 ans
J 3 catégorie crée le 01/07/1941 concernait les adolescents de 12 à 21 ans et les femmes enceintes. (J 3 restera longtemps dans le langage pour désigner une classe d’âge).

                                                      

Tous les coupons étaient collés sur 1 feuille spéciale tenue par le commerçant, remise ensuite à la mairie puis transmise à la préfecture.
                                                         
De cette formalité naissaient des problèmes de fraudes qui profitaient à certains sujets que l’on choyait complaisamment. Pain, viande, chocolat, café, sucre etc  tout était contingenté et les stocks s’épuisaient souvent sans être réapprovisionnés.

                                         
Quant aux chaussures et aux vêtements, il ne fallait pas faire la grimace devant la forme et les semelles de bois articulées…
                                                            
L’occupation allemande n’épargna pas le pays avec ses nouvelles réquisitions, ses exigences et même ses perquisitions sous les ordres des Kommandanturs.  Ils s’imposaient en maître. Ils étaient servis en premiers. Ils aimaient rire de la population affolée par leurs attitudes dominatrices.

Un soir dans le bourg de Courcôme, un commandant qui logeait chez l’habitant fit sonner l’alerte pour voir son hôtesse en bigoudis! Quelle bêtise, surement que le festin arrosé de bon vin et de cognac y était pour quelque chose.
Cette France vaincue et occupée en partie était sous l’autorité influençable du maréchal Pétain.

Les gens cherchaient à passer cette fameuse ligne de démarcation qui leur offrait l’hospitalité en Dordogne, en Haute-Vienne, etc…

Les hommes et certaines femmes créèrent les F.F.I et les maquisards, tous étaient là pour traquer l’ennemi.

Ils menaient différentes opérations pour piéger les Allemands : Ainsi  à la sortie de Courcôme au pont de chemin de fer sur la route de Ruffec. Ce fut l’arrêt immédiat d’un convoi de troupes du génie. L’ennemi devenu furieux dans un charabia coléreux ordonna la réquisition immédiate de charrettes et chevaux pour traîner les troncs d’arbres destinés à supporter les rails. Un jeune officier (alsacien) demanda à la population d’obéir strictement aux ordres donnés afin de mettre toutes les chances du côté du village et éviter une prise d’otages.
Pas d’attroupement, couvre-feu, nous étions dominés par ces hommes en habit vert que nous logions, nourrissions et qui de plus se moquaient de nous.

Le maquis travaillait fort pour éliminer les hommes et le matériel.

D’un autre côté certains servaient l’ennemi en lui livrant des innocents : la milice (française) dénonçait et ce n’était pas un secret. Les brimades ne cessaient pas et les bottes frappaient le pavé avec fermeté.
Puis le débarquement arriva là où aucune autorité ne les attendait. Le revers de la médaille était arrivé. L’heure de la libération allait sonner – jour magique et cruel où l’appel du 18 juin 1940 fut lancé.
Dans l’affolement, se voyant dans une mauvaise passe, ce fut la vraie débâcle, laissant derrière elle des traces indélébiles, cruelles, abominables de barbarie.


En bas de notre village, au bord de la route venant de Ruffec, il y eut un dépôt d’obus et de poudre. Ils avaient abandonné au sort du feu tout cet arsenal. Nous avons vu alors des gerbes d’étincelles, entendu les détonations des obus. Le tas fumant de cet amas de cendres  et de cuivre persista plusieurs jours et charge au propriétaire de s’en débarrasser afin de nettoyer le terrain.
Triste souvenir qui ouvre l’horizon d’une ère nouvelle. En effet, après cette période de privations, on s’apprêtait à vivre dans le progrès en tout genre.

Les engins modernes supplantent les autres ;
Dans l’agriculture : apparition des tracteurs, charrues, semoirs, moissonneuse, lieuse, faucheuse, râteau à cheval, batteuse.

A la maison : cuisinière, machine à laver, fer à repasser électrique …

Tout ce matériel tellement apprécié a eu une longue ère de gloire. Supplantés par les outils actuels, ils paraissent tellement petits et ridicules. Malgré tout, ils ont quand même bien vieilli puisque certains ornent les parcs de nos communes.